Avant toute chose, et pour répondre aux inquiétudes de nombreux fans, pouvez-vous nous en dire plus sur la santé de Keiko (qui avait été hospitalisée et opérée d'urgence au début de l'année) ?
Marc Panther : Elle va très bien. Je suis allé chez elle le mois dernier, elle parle, bouge, chante normalement.
Bien sûr, on peut imaginer que cela puisse compromettre ses projets musicaux.
Marc Panther :
TK m'a téléphoné hier et m'a dit « Ça va peut-être redémarrer. ».
Nous aurons l'occasion d'y revenir un peu plus tard. En guise d'introduction, pouvez-vous vous présenter et nous faire part de votre carrière des plus riches ?
Marc Panther : Je suis né à Marseille, et à deux ans je suis parti au Japon. Mon père était professeur de français et mannequin. Un jour, il m'a emmené avec lui à une session photo. Il m'avait mis sur ses genoux, le photographe a pris ça et finalement c'est cette photo qui a été gardée pour la pub. Ça, c'était mes vrais débuts, et puis ma mère a trouvé que ça serait marrant de me mettre dans l'univers des mannequins pour enfants, et donc par la suite j'ai fait plein de trucs de ce style. Je suis aussi apparu dans un film à 15 ans, « Bye Bye Jupiter », un truc de science-fiction assez marrant, j'avais le deuxième rôle. Avant
globe, j'étais mannequin dans un magazine qui s'appelait MEN'S NON-NO, c'était un peu le GQ japonais et ça cartonnait comme pas possible. Ils vendaient dans les deux ou trois millions d'exemplaires par mois, et j'étais le seul mannequin métissé français, ils étaient tous japonais. Donc, il y a beaucoup de gens qui me connaissent en tant que mannequin pour MEN'S NON-NO, parce que c'est un truc qui a cartonné comme
globe. A l'époque, tout le monde était habillé comme je l'étais sur les photos.
Après MEN'S NON-NO, j'ai travaillé pour MTV, qui est venu au Japon à la fin des années 80. J'ai passé une audition et ils m'ont pris. C'est là que
TK m'a vu pour la première fois, quand je présentais les musiques du monde. Il m'a appelé et m'a demandé si je pouvais rapper, parce que le rap à l'époque c'était plutôt gangster, il n'y avait pas de hip-hop un peu « joli ». Il m'a demandé si je pouvais faire ça en français et je lui ai dit qu'il n'y avait aucun problème. On a fait une première tournée au Japon, vingt-sept concerts « eurogroove », comme on disait à l'époque. C'étaient des concerts de quatre mille personnes, et moi j'étais le MC qui rappait en français et en japonais. Ça a plu à
TK et à la suite de ça, on a décidé de faire une autre tournée pour trouver une chanteuse. Il voulait faire un groupe comme les
2 Unlimited, avec un mélange rappeur-chanteuse. On a fait passer des auditions dans tout le Japon et on a trouvé
Keiko à Fukuoka. Beaucoup de gens étaient venus, on en a fait une vingtaine en tout et à chaque fois à la fin on faisait un petit concert. A Fukuoka,
Keiko est arrivée, elle est montée sur scène après que je l'ai présentée, puisque je faisais le MC aussi. Quand je l'ai annoncée, elle est tombée de scène. On s'est dit que c'était fini pour elle, mais elle est remontée et elle a commencé à chanter. Il y avait déjà des fans qui gueulaient en se demandant ce qu'elle allait bien pouvoir faire après cette chute. C’est ce courage qui a motivé
TK. Il m'a demandé ce que j'en pensais, je lui ai dit que je trouvais la voix blues, super bien. On a enregistré quelques essais ensemble, ça a plu à
TK et il a décidé de rentrer dans le groupe aussi ! Et voila, c'est comme ça que
globe a démarré.
Donc quand vous êtes rentré dans le groupe, on vous voyait comme le mannequin de MEN'S NON-NO qui fait de la musique ?
Marc Panther : Ouais c'est ça, et aussi en tant que premier présentateur de MTV Japan. Et
globe est venu après et a explosé... Trente millions d'albums en dix ans.
Vous vivez en partie en France. Pourquoi ce choix ? Cela pose-t-il des problèmes pour travailler avec le reste du groupe ?
Marc Panther : J'ai fait ce choix parce que j'ai une fille. Un jour, je l'ai vue devant la télé en train de baver, alors je me suis dit « Non, ça ne va pas, on va sortir de cette ville, Tokyo c'est bien pour nous, mais ce n'est pas bien pour un bébé ». Et donc on est partis dans les îles, à Okinawa, dans le sud du Japon, où elle a fait sa maternelle. Quand elle a eu sept ans et qu'elle a dû rentrer en CM1, je me suis dit qu'au lieu de la mettre dans un lycée franco-japonais, ce que moi j'avais fait et qui ne m'a presque servi à rien, il valait mieux la mettre dans une école internationale, où elle parlerait anglais dans un pays français tout en parlant japonais à la maison. Donc, je suis parti en France pour son éducation.
Jusqu'à
globe, dans ma vie, c'était toujours moi la priorité, l'acteur principal, mais lorsque que ma fille est née, je me suis dit que ce serait elle et que moi je ne jouerai que le second rôle, qui est de la soutenir, et c'est ce que je suis en train de faire maintenant. Je pense que c'est un bon choix, car elle parle trois langues parfaitement et elle s'amuse comme pas possible. Par exemple, elle est dans un club d'équitation. Au Japon, il faudrait payer dans les trente mille euros pour être adhérent et la séance serait aux alentours de cent ou cent cinquante euros, alors qu'ici c'est vingt euros l'adhésion et six la leçon. Du coup, elle fait plein d'activités, du karaté, etc. Il y a le pays qui t'aide pour ça, et ça n'existe pas au Japon.
Pour le travail avec le Japon, il y a internet et toutes les fins de mois j’y retourne, donc il n'y a aucun problème. C'est un peu fatigant, mais ça reste gérable.
Où en êtes-vous de votre projet 245 ? D'ailleurs faut-il prononcer le nom à l'anglaise ?
Marc Panther : J'ai choisi les chiffres parce que tu peux les lire dans toutes les langues. J'aime bien quand on me demande dans quelle langue il faut le prononcer, parce qu'on le dit différemment que l'on soit en France, en Amérique ou au Japon. C'est international et c'est pour ça qu'on l'a choisi. Nous, on le prononçait « 24/5 », pour 24 heures sur 5 jours. On voulait deux jours de repos, donc 24/7, ça serait bosser toute la semaine. Dans la musique, il faut toujours au moins deux jours de repos, donc on a choisi « 245 ». Faut l'imaginer avec le slash.
Chami est le guitariste-compositeur. Maintenant que je suis en France, il a un peu arrêté la musique. C'est un des meilleurs guitaristes que je connaisse, il est toujours très bon. Sur mes autres projets, il m'aide beaucoup, on s'envoie des musiques sur internet.
Après, l'autre membre,
Dan Dan, il est à Paris. C'est un grand organisateur d'Ibiza et du monde entier. Il faisait des tournées avec les éclipses solaires. Chaque fois qu'il y avait une éclipse quelque part dans le monde, il partait là-bas et organisait de grosses soirées. Maintenant, il organise le BIG BEACH FESTIVAL au Japon. Cette année, ça sera le 4 juin et il a appelé les
Chemical Brothers !
Dan Dan, c'est un grand copain d'enfance, on se parle sur Skype tous les jours.
C'est un peu difficile de faire démarrer
245 maintenant. Nous avons toujours ce problème de boîte de disques avec
globe et nous n'avons pas toutes les libertés qu'on souhaite. Nous sommes en stand-by.
Quels sont vos projets solos actuels et futurs ?
Marc Panther : Depuis le printemps de l'année dernière, je me suis mis au DJ. Pourquoi ce choix ? Parce qu'en tant que
globe, pour pouvoir faire quelque chose, il faut toujours être à trois, et quand les trois se retrouvent, il y a au moins cent cinquante personnes du staff qui bougent derrière, donc c'est une grosse production qui bouge quand
globe bouge. Donc il est quasiment impossible de faire quelque chose. Alors je me suis dit que si j'étais seul, je pourrais faire ce que je veux, je pourrais faire ma musique et la jouer là où je veux, donc je me suis mis à mixer. Et quand j'ai commencé à faire ça, j'ai vu que le DJ c'était du média, et qu’en tant que DJ, si j'avais quatre mille personnes devant moi, j'étais comme une radio ou une télévision, je pouvais mettre la musique que je voulais au moment où ça prenait feu. En prenant l'exemple d'une radio, au lieu de mettre
globe à midi, je pouvais le programmer à 19h quand tout le monde rentrait chez lui et écoutait la radio, et ça c'était le DJ pour moi. Là pour l'instant, j'ai signé un contrat et je mixe toutes les fins de mois. Je pars au Japon, je mixe dans des boîtes. Il n'y a pas que des clubbeurs mais aussi des fans de
globe qui viennent et ils chantent avec moi dès que je mets « Feel Like Dance » de
globe, c'est très médiatique, mais c'est très intéressant. Ce n'est pas le truc que j'adore le plus, le commercial… Parce que je suis plutôt soul, reggae, techno, underground, mais comme j'ai fait quinze ans de commercial, je sais comment gérer les fans. Je fais ça comme si c'était un concert et ça met le feu, ils adorent ça. Là, j'ai deux festivals en été dont le BIG BEACH FESTIVAL le 4 juin. Ça c'est mon projet solo musical.
Sinon je vais ouvrir un bistrot à Nice qui s'appellera « L'école de Nice » avec un cuisinier japonais qui va faire de la cuisine niçoise. Et là-dedans, j'ai mis deux platines et je vais m'occuper de la musique. Je vais aussi ouvrir un label, qui aura le même nom, et qui va être un peu franco-nippo-niçois. Ça va ouvrir en avril et ça sera mon deuxième projet, et quand j'en ai parlé dans tout Nice, il y a un hôtel très design et branché, le Hi Hotel, qui était intéressé et on a organisé une Tokyo Night le 16 mars ! Un peu plus de cent personnes sont venues ! Un mercredi soir ! J'ai joué avec deux autres DJ de la techno et de l'underground très japonais avec un visuel très néo-japonais, un peu otaku.
C'est le fait de montrer ce néo-Japon, qui n'est ni le sushi, ni le sumo, ni les geishas, ni le mont Fuji, et qui est quelque chose de très jeune. Ton site, par exemple, c'est très néo-Japon je pense. Japan Expo, c'est très néo aussi, et c'est ça que j'essaye d'intégrer un peu ici avec Tokyo Night. Et donc, je suis en train de me dire « Il faut le faire ». Ce n'est pas « on pourrait », c'est une étape supérieure, on est là, il faut le faire. La prochaine, ça sera le 6 avril !
Et puis, ça va peut-être briser certains clichés sur le Japon également.
Marc Panther : Oui, parce que le Japon ce n'est pas que ça. Bien sûr c'est joli, c'est super... Mais il y a autre chose. Même dans le sushi ou le mont Fuji, il y a un peu de néo maintenant, il faut le voir comme ça.
Qu'est-ce que les autres membres de globe pensent de vos projets ?
Marc Panther :
Keiko, à chaque fois que je joue, elle s'éclate, elle adore ça.
TK lui, il est plutôt business, donc chaque fois que je fais quelque chose, il me dit : « Je vais te présenter ci, je vais te présenter ça ». Je pense que mes nouveaux projets, ce nouveau mouvement que je suis en train de faire émerger en tant que DJ, sont en train de les faire bouger un peu.
TK commence à y réfléchir sérieusement. Quand on a fait notre projet "eurogroove" avant
globe, moi j'étais MC rappeur et il y avait
TK au synthétiseur et un DJ. (L'actuel DJ de
TRF, groupe qui a cartonné au Japon dans les années 90, dans lequel se trouvent aussi de danseurs et une chanteuse). Je pense que
TK est en train de réfléchir à un nouveau mouvement de ce genre avec moi en tant que DJ rappeur.
Ça restera globe ou s'agira-t-il d'un autre projet ?
Marc Panther : Ça sera
globe je pense. Du moins, je l'espère. Je suis sûr que si j'étais venu ici en France et que je m'étais reposé, que j'avais grossi de vingt kilos avec le vin, la bonne bouffe et tout ça, rien n'aurait marché. Mais depuis tout petit, je rêve, j'essaye de progresser tout le temps, et c'est ça que
TK a aimé. Il était sûr que j'allais faire quelque chose et quand il m'a vu la dernière fois jouer avec les platines, il a ressenti quelque chose.
Et que pensez-vous de leurs projets à eux ?
Marc Panther : L'année dernière,
TK a écrit plus de cent cinquante chansons. Cent cinquante morceaux, à écrire, c'est quelque chose de balèze, c'est un génie. A chaque fois que je le vois, je lui dis « Allez, enfuis-toi, viens en France ou en Europe, il y a tout le monde qui t'attend. Tout ce que tu fais en tant que techno, en tant qu'underground et même en tant que commercial, en tant que musique numérique avec tes synthétiseurs, et tout ça, il n'y a personne qui puisse le faire ici ». On a fait un concert avec notre ami
Jean Michel Jarre en 1995 au Champ de Mars. Un million de personnes devant
Jean Michel Jarre et
globe, c'était fantastique.
TK et
Jean Michel Jarre, c'était incroyable. Je les ai vus ici en train de travailler, s'ils recommençaient… C'est sûr que ça cartonnerait dans le monde entier.
Moi je préférerais le voir comme ça plutôt qu'esclave dans un petit studio à Tokyo. Mais s'il partait du Japon, tout le monde dirait qu'il s'est enfui. Tous les médias lui sauteraient dessus en disant « Il s'est encore enfui. ». Moi je pense que ce n'est pas une fuite mais un nouveau challenge… C'est un peu dommage. Les médias japonais ne le verraient pas comme ça… Moi je ne le vois plus en liberté, mais s'il est en liberté, tout le monde va encore dire qu'il s'amuse, donc c'est très difficile pour lui maintenant de faire de la musique avec ces médias derrière lui. Mais il le fera, parce qu'il adore ça. Il ne peut rien faire d'autre, c'est un gamin qui s'amuse avec des jouets. Il a un nombre incroyable de synthétiseurs, je lui dis tout le temps « Mais c'est la même chose tout ça ! », et lui il me répond « Non non, absolument pas ! ». On est toujours amis, on se téléphone tout le temps et chaque fois que je rentre au Japon, je suis toujours chez lui.
Vous utilisez plusieurs noms. En France, c'est Marc Jule Pinsonnat, au Japon c'est Ryuichi Sakai, et sur scène c'est Marc Panther. Pourquoi ces choix ?
Marc Panther : Je suis né
Marc Pinsonnat, c'est mon vrai nom. J'ai choisi
Ryuichi Sakai car au Japon, tu n'as pas la double nationalité, ça n’existe pas et ils ne le voudront jamais. Il y a une loi qui a été votée et tu n'as plus le droit d'avoir la double nationalité, donc à ta majorité tu dois choisir. Et moi, à ma majorité, j'étais en plein MEN'S NON-NO et ça cartonnait, je ne pouvais pas abandonner ma nationalité japonaise. J'ai vu la chance que j'avais et j'ai décidé de continuer là-dedans. Finalement, j'ai réussi donc ça n'a pas été un mauvais choix. Quand j'ai choisi ma nationalité japonaise, au Japon ça n’existait pas Pinsonnat, tu ne peux pas l'écrire en kanji, donc on m'a donné le nom de ma mère, Sakai, qui veut dire « puits d'alcool ». C'est ma grand-mère qui m'a nommé Ryuichi en disant que j'étais le « premier dragon », donc on allait me nommer « le premier dragon qui sort du puits d'alcool » (Rires). J'ai donc eu ce nom à ma majorité.
J'ai choisi le pseudonyme
Marc Panther parce qu'au Japon ils n'arrivaient pas à dire « Pinsonnat ». Si tu as un pseudonyme dont personne ne peut se rappeler, jamais tu ne gagneras dans le show business, alors j'ai trouvé ce nom, Panther (prononcer « Panssa »), parce que les gens prononçait mal mon nom, ils disaient « Pansonnat ». Pinsonnat... « Pansonnat »... Panther... Il y avait déjà la « Pink Panther » qui était très connue et c'était beaucoup plus facile de dire « Panther » pour un Japonais. Je dois être le deuxième Panther connu au Japon. Dans le show business, il faut toujours avoir un pseudonyme dont tout le monde peut se rappeler. Tout ça part de la prononciation à la japonaise de mon vrai nom.
Quelles différences y a-t-il entre la vie en France et la vie au Japon selon vous ?
Marc Panther : Les Français, ils sont cons… Et les Japonais, ils sont fous… Donc moi, je suis con et fou en même temps (Rires). En France, par exemple, tu ne verras jamais la fille qui bosse à la Poste t'aider avec un grand sourire jusqu'à ce que ton problème soit résolu, alors qu'au Japon, même si la boutique est fermée, ils t'aideront jusqu'au bout. Et là-dedans, lequel est le mieux ? Bien sûr, si on t'aide jusqu'à la fin c'est mieux, mais moi, quand j'ai vécu au Japon, j'ai trouvé que tout ça c'était du mensonge parce qu'en vrai ils ne veulent pas le faire. Quand ils te sourient, il y a toujours un mensonge derrière, alors qu'en France, le sourire, il est quand même vrai parce que s’ils ne veulent pas sourire, ils ne sourient pas. C'est le pays où il y a le moins de sourires (Rires), donc il n’y a pas de mensonge je pense. C'est complètement différent. On peut vivre dans les deux pays, mais ce qui est bien, c'est de se rappeler qu'avant d'être français, on est quand même un être humain qui vit sur le globe. C'est pour ça que j'ai adoré ce nom,
globe, qui signifie un monde sans frontières. Moi, quand je suis
globe, je suis français et japonais en même temps, donc quand je suis en France, j'essaye d'être gentil au maximum, ce qui n'existe pas chez les Français et c'est pour ça que les gens m'aiment bien ici. Et quand je suis au Japon, j'essaye de mentir le moins possible, et là ils me trouvent vraiment sincère. C'est ça qui est bien : faire quelque chose qui n'existe pas chez les autres, c'est ça qui créé le coup de cœur.
C'est un comportement qui doit surprendre au Japon, voire même en France.
Marc Panther : Oui, mais je pense qu'à la base, les samouraïs étaient comme ça. Après ils ont perdu la guerre et ça s'est américanisé un peu et puis, je ne sais pas, ils ont voulu cacher quelque chose et ils le cachent toujours. C'est le Japon... Mais ils ont toujours ce bushidô, la voie du samouraï, dans leur cœur, et quand tu es sincère, ils se rappellent de ce truc et ça les marque, ils aiment ça.
Pouvez-vous nous en dire plus sur la dernière sortie de globe, House of globe
?
Marc Panther : C'est un disque de remix, ce n'est pas nous en fait. Ce sont des balèzes qui ont remixés ces titres. Mais sincèrement, en tant que DJ, je trouve que cet album est très difficile à placer sur une piste. Ni commercial, ni underground…C'est très spécial. Tu l'as écouté ?
Non pas encore. Il faut avouer que les disques de globe sont assez durs à trouver en France.
Marc Panther : Ah ouais ? Il faudrait faire quelque chose je pense. Mais donc, ce dernier
House of globe, c'est génial, c'est fait par de super DJ, de super producteurs, mais je n'ai pas compris ce qu'ils voulaient faire. Si c'est un remix, tu dois pouvoir le jouer en club ou chez toi. Le truc c'est que celui-là, si tu le joues chez toi, c'est un peu trop fort, et si tu veux le jouer dans un club, ça ne l'est pas assez. Donc je n'ai pas très bien compris où ils voulaient en venir avec ce disque. C'est fait par des grands types, c'est pour ça que je voulais qu'il y ait quand même un petit meeting avec tout le monde. Bien sûr, quand c'est sorti, comme je suis DJ, j'étais super content parce que je pouvais mettre tous les supers morceaux de
globe, mais il n’y en avait aucun qui marchait sur une piste en feu en plein milieu d'une soirée.
En ce qui vous concerne, vous n'avez pas eu un droit de regard sur les chansons qui ont été sélectionnées ?
Marc Panther : Non. Pour l'instant, tout est fait comme ça, à la chaîne. Il sont obligés de le faire, ils sont obligés de gagner tout ce qu'ils ont perdu donc ils le font. De mon côté, je suis en train de faire un album de remix. Je les fais moi-même, je demande aussi à mes amis, mais ce sont des remix qui sont jouables en cœur de soirée dans les grosses boîtes. Grosse caisse, 128, électro-house, que des trucs comme ça quoi. C'est de la musique d'aujourd'hui et c'est ce que je suis en train de mettre sur les pistes, donc je le vendrai peut-être l'année prochaine.
Surtout qu'il y avait déjà d'autres excellents albums de remix de globe, comme les Global Trance Best
.
Marc Panther : Là, on était dedans. Il y avait des meetings tous les jours, on bossait dessus. Alors, quand t'écoutes le
Global Trance Best et tout ça, c'est du bon. C'est des trucs que tu peux passer dans les soirées.
Vous avez d'ailleurs joué des concerts dans ce style.
Marc Panther : Les « Category Trance ». Là, ça prenait feu, c'était fou ! C'est des trucs comme ça qu'il faut faire maintenant. Si
TK venait ici, on cartonnerait avec ce genre de musique.
Vous avez eu cette période trance, mais vous avez fini par passer à autre chose.
Marc Panther : Après « Trance », qu'est-ce qu'on a fait... On est revenu un peu à la pop. Je crois que c'est là qu'il y a eu des problèmes, que nous ne connaissions pas, qui commençaient à apparaître chez
TK. Il devait peut être… absolument vendre… Mais les CD ne se vendent plus... C'est jusqu'aux « Trance » que tout s'est vendu. C'est vraiment en dix ans qu'on a vendu les trente millions d'albums et tout ça, mais après, ça ne se vendait plus, les mecs, ils téléchargeaient gratuitement, c'était fini.
D'ailleurs, personnellement, c'est la période trance que je préfère dans votre carrière. Outernet, Lights, Level 4
...
Marc Panther : Ouais,
Garden et tout ça. Et il y en a qui ont dix ans de plus que toi et qui vont préférer le style
Faces Places, un peu rock, un peu pop... J'ai toujours aimé
globe pour ça, parce que pour moi au Japon,
globe, c'était un groupe genre
U2 ou
Rolling Stones, des groupes qui ne vieillissent pas. Il faisait toujours quelque chose de nouveau, tu avais des fans qui n'aimaient plus ce qui sortaient, mais qui adoraient ce qu'il faisait avant et inversement. Tu avais toujours des nouveaux fans, c'est ça
globe. Alors que les autres groupes japonais, ils vieillissent avec leurs fans et à la fin ils sont tous vieux. Mais quand tu vois les
Rolling Stones, qui ont 60 ou 70 ans comme le batteur, tu as des filles de 20, 25 ans qui sont aux concerts parce qu'ils font toujours des trucs nouveaux,
U2 aussi.
globe, c'était ça aussi. On parlait de ça tout le temps, on se disait qu'il ne fallait pas que la musique de
globe vieillisse. Il fallait faire du digital rock, ensuite de la trance, après il fallait faire ça, etc. Vers la fin,
TK m'a dit : « Il faut refaire de la pop ». Oui, pourquoi pas... Je pense qu'on aurait peut-être dû faire de l'électro pop, un truc comme ça. Je pense qu'il serait balèze là-dedans.
Votre reprise de Get Wild
est vraiment excellente.
Marc Panther : Ouais, c'est génial ! C'est un truc qui n’est pas sorti,
Get Wild, c'est dommage...
Elle est sur la chaîne Youtube d'Avex.
Marc Panther : La vidéo du concert sous la pluie (au A-nation). Ça, c'était la musique d'un manga qui s'appelle City Hunter. C'est
TM Network qui la joue à la base, un groupe de
TK. Le morceau sortira un jour, il doit y avoir des problèmes de droits parce que le vrai
Get Wild c'est Sony, et nous, on est Avex.
globe existe depuis 1995. Est-ce qu'il y a des moments qui vous ont marqué plus que d'autres au cours de votre carrière ?
Marc Panther :
Faces Places, au bout de deux ans, quand ça cartonnait le plus. C'était la folie, on habitait à Los Angeles, c'était fou. Mais ça allait trop vite, limite on ne se rappelle de rien. Bien sûr, quand tu te concentres bien, tu te rappelles de beaucoup d'images, mais ça allait trop vite. Comme je l'ai dit tout à l'heure, je suis très reggae, blues, rock, donc j'adorais la musique qu'on faisait. A cette époque, tous les concerts et les enregistrements étaient faits avec de vrais instruments.
TK travaillait ça sur ordinateur bien sûr, mais tout passait par des guitares, des basses, etc. C'était très analogue. C'est le moment où je me sentais le plus musicien.
Quelle était votre place dans le processus créatif et les enregistrements ?
Marc Panther : Moi, j'écrivais les paroles, j'étais le poète. A Los Angeles, quand je me réveillais, devant ma porte, par terre, il y avait déjà quatre cassettes DAT, et j'étais obligé d'écrire tous les jours. A la fin, il y avait des éléphants roses qui sortaient dans les paroles de
Namie Amuro... (Rires) C'était un rythme dingue. Maintenant je ne peux plus écrire ce que j'écrivais alors, c'était balèze. C'était la folie, ça allait très vite, très très vite. Tu ne dormais pas du tout, parfois pendant 72 heures.
TK en plus, il ne dormait pas, il bossait tout le temps. C'est vraiment comme ça qu'il a vendu cent millions d'albums. A lui tout seul.
Avez-vous un souvenir de tournée en particulier ?
Marc Panther : Les tournées de
Faces Places par exemple, c'était tous les dômes. Cinquante mille personnes devant toi. Mettre le feu à cinquante mille personnes, c'est quelque chose et ça c'était tous les jours. En une semaine, on a joué devant plus de quatre cent mille personnes, c'était un record. On était devant
U2.
Vous êtes aussi très connus pour le côté spectaculaire de vos concerts.
Marc Panther : Oui,
TK adorait ça.
Y a-t-il quelque chose dont vous êtes particulièrement fier au sein de globe ?
Marc Panther :
globe, comme je l'ai dit, n'a aucune frontière. Un groupe se dispute toujours à un moment donné, parce que trois personnes n'ont pas toujours les mêmes sentiments musicaux. Quand le succès arrive, ils se battent et tu vois le groupe qui disparaît. Mais dans
globe, pour l'instant, il n’y a pas ça. Je ne sais pas pourquoi, ce n'est pas une famille, ce n'est pas de l'amour, des copains, c'est quelque chose d'autre, c'est
globe. C'est marrant, on se voit à chaque fois, on ne se bat jamais, on est toujours d'accord. Je pense que c'est parce que c'est
TK, c'est grâce à son génie.
Vous nous disiez à l'instant que globe signifiait la Terre et l'absence de frontière. Pourquoi ne pas avoir envisagé de carrière internationale ?
Marc Panther : Quand on était à Los Angeles,
TK faisait des musiques pour Hollywood, par exemple celle de « Speed 2 ». On a fait des concerts à Pékin, Shanghai avec le nom de
Groove Museum, « le musée du groove ». On faisait des tournées techno partout, vingt mille, trente mille personnes. Mais il n’y avait pas
Keiko, alors on choisissait des chanteuses des pays où on allait. Avec
globe, on a fait Taïwan, Hong Kong… Mais jamais l'Europe...
Est-ce encore envisageable aujourd'hui d'essayer de s'exporter ?
Marc Panther : Oui, je pense. Si on le libère (
TK), il vient ici, je lui prépare le studio tout de suite, et c'est parti !
Il est clair qu'il y a des chances que ça marche.
Marc Panther : 100%. Ça cartonnerait.
TK en Europe, c'est la folie. L’Europe c'est l'électro, la techno et lui c'est le génie. C'est un fou de musique numérique.
C'est d'ailleurs quelqu'un de reconnu sur la scène électronique internationale.
Marc Panther : Oui.
Que préfériez-vous avec globe, les concerts ou le travail en studio ?
Marc Panther : Quand je faisais des concerts, je préférais le studio, mais maintenant qu'on n’en fait plus, je me dis que les concerts c'était quand même pas mal. C'est deux trucs complètement différents. On veut toujours ce qu'on n'a pas, c'est ça qui fait qu'au moment où on fait quelque chose, on le fait dix fois mieux. Si on veut toujours ce qu'on a, je pense que tout devient normal, on est blasé.
Quels sont les projets futurs de globe ?
Marc Panther : Il y a beaucoup de gens de la boîte de disques qui me téléphonent et
TK aussi, ils me disent « prépare-toi », donc peut-être qu'il y a quelque chose qui va démarrer. Mais ça se passera au Japon au début, et comme je l'ai dit avant, quand
globe bouge, il y a plus de cent cinquante personnes qui bougent, alors on ne peut pas juste dire « Bon, O.K., on y va ! ». Ça ne marche pas comme ça, il y a beaucoup de préparation. En plus maintenant, il y a eu plein de mauvaises nouvelles ces derniers temps, alors ils prennent le temps de le préparer. L'attente est énorme. Quand on a joué au A-nation en 2009, avec la chanson
Get Wild, ils ont vraiment aimé. Mais je m'en rends compte partout. Par exemple, cet hiver, à Noël, j'ai fait le DJ à Shanghai, il y avait énormément de fans de
globe, ils se déplacent. La plupart des personnes qui viennent sont fans du groupe. Quand je parle avec eux, je vois que toute leur jeunesse est basée sur
globe, parce qu'une personne sur quatre avait notre premier album à l'époque. Je crois qu'il faut qu'on redémarre maintenant, pas dans deux ou trois ans.
Rétrospectivement, est-ce que vous pensez que globe a apporté quelque chose de spécial à la musique japonaise ou même à la pop en général ?
Marc Panther : Oui, je pense. Ce que
TK a amené au Japon, c'est quand même énorme. Ça a été le premier à créer de la pop comme ça. Avant, c'était plutôt de la pop à l'ancienne, et maintenant, tout ce qui se fait, ça vient de ce qu'il a fait. Si on prend l'exemple du rap, maintenant tu as du rap partout, même dans les publicités, et c'est lui qui m'a fait rapper sur du commercial et qui a popularisé ça. On ne le sentait pas, mais quand on regarde dix ans en arrière, on se dit qu'on a créé un truc.
Qu'est-ce qui vous plaît dans la musique japonaise en ce moment ?
Marc Panther : Au Japon, ou peut être comme partout dans le monde, si tu as un bon promoteur, si tu as du fric, si ta boîte de disques à tout ce que tu veux, tu as une très grande chance de réussir. Au Japon, le top 10, c'est des artistes qui font partie de ce groupe-là. Donc je trouve que leur musique se ressemble beaucoup. Mon idée serait de faire un enregistrement d'idoles, genre
AKB, en Europe et faire une tournée. Ça déclencherait un nouveau mouvement qui donnerait une pointe d'épice dans le show business japonais. Il y a beaucoup d'artistes qui essaient de sortir du Japon, et ceux-là, je les aime bien. Il y a
Utada Hikaru, qui fait de la musique aux États-Unis, que j'aime beaucoup.
Puffy aussi a bien réussi en mélangeant la BD américaine avec sa musique. Par exemple,
Yoshiki a fait le World Tour, c'est balèze ! Il a été membre de
globe pendant un, deux ans. C'est un mec qui est super dur dans la musique, mais il faut être dur pour pouvoir réussir dans le monde.
Il impose ses décisions, c'est ça ?
Marc Panther : Oui, il impose ses décisions, s'il ne veut pas, il ne veut pas. Si ce n'est pas la voix qu'il a voulue, c'est vingt heures d'enregistrement...
Qu'est-ce que vous retenez de cette collaboration avec lui ?
Marc Panther : Il était sympa, et j'aimais bien travailler avec lui. Mais
TK et
Yoshiki, c'était trop grand, deux énormes bêtes de la production qui se retrouvaient, ce n'était plus de la musique, c'était politique. Là, ils sont toujours amis, mais si c'est pour bosser ensemble, c'est trop gros. Si cent personnes marchent avec
TK, il faut que
Yoshiki en ait aussi cent, c'est deux présidents en déplacement.
C'est un peu ce qui avait conduit X JAPAN à se séparer en 1997.
Marc Panther : Je pense.
Yoshiki, c'est la perfection, il faut que tout soit parfait. C'est des trucs comme ça qui ont conduit à son départ. Mais sinon, c'était super, et quand je vois
X JAPAN qui fait le tour du monde, je trouve ça super, pareil pour
Gackt !
AKB48, je pense qu'elles devraient plus sortir, on les voit à Cannes et à Japan Expo, mais il faudrait qu'elles sortent encore plus.
Est-ce que vous avez vu un de ces trois groupes en concert dernièrement ?
Marc Panther : Non. J'écoute les CD, j'adore. La dernière fois que j'ai vu
X JAPAN en concert, c'était au Tokyo Dome, quand il s'est reformé. C'était bien, du rock visual japonais, c'est de l'entertainment. Sinon le président d'
AKB48 est un super ami, donc quand elles n’étaient pas du tout connues et qu'elles ont fait leur tout premier concert, nous y sommes allés. Beaucoup de gens avaient posté sur internet « Qu'est-ce que
Marc fait ? Il va voir les petites idoles ? » (Rires). Je les ai suivies dès le début. Maintenant, c'est le top des idoles du Japon.
Vous appréciez ce style musical ?
Marc Panther : Oui. C'est très japonais, c'est du néo. Là-dedans, il y a un business à faire.
Miko Okada, celle qui fait la musique, est une amie. La musique qu'elle fait me plaît bien.
Quels sont les artistes hors Japon qui vous plaisent en ce moment ?
Marc Panther :
Guetta par exemple, j'ai plein d'amis DJ qui me disent « C'est de la merde ça ». Moi je trouve que c'est balèze, un Français qui est sorti des Bains Douches et qui s'est battu toute sa vie accompagné de sa femme et qui finalement réussit, va en Amérique et travaille avec toutes les stars. Je pense qu'un Américain ne chanterait jamais sur la musique d'une personne en qui il n'a pas confiance, il fait ça parce qu'il aime cette musique. Et sa musique plaît dans le monde entier... Il y a beaucoup de gens qui ne l'aiment pas, ça fait parler, mais il y a aussi énormément de gens qui l'aiment.
On lui reproche beaucoup son côté commercial.
Marc Panther : Si personne ne lui reprochait, personne ne l'aimerait non plus. C'est pareil pour
globe, il y avait beaucoup de gens qui nous reprochaient ça, il y a beaucoup de radios très spécifiques qui ne mettaient jamais nos chansons.
Lady Gaga aussi, je trouve que c'est quelque chose de merveilleux, ses concerts et tout ça ! Bien sûr c'est pop, c'est commercial, mais je trouve ça super. J'ai essayé d'aller la voir en concert, mais à cause de la neige à Paris ça n’a pas été possible. De toute manière, je préfère regarder tout en DVD de façon à voir vraiment ce que l'artiste fait.
C'est assez paradoxal pour quelqu'un qui donne des lives de préférer regarder les concerts en DVD.
Marc Panther : Les concerts, je préfère les faire, ceux des autres, je préfère les regarder sur un écran.
Pour finir, avez-vous un message à faire passer à vos fans ?
Marc Panther : Au Japon, nous avons eu un grand malheur l'année dernière. J'y suis allé tout l'été dernier pour les réveiller un peu, parce que plus personne ne sortait dehors, n'allait au restaurant, tous les bars se cassaient la gueule, tout le monde se suicidait... J'y suis allé pour jouer gratuitement tout l'été dans tous les clubs de Tokyo pour les réanimer. Maintenant, je sais que tous ces types, les jeunes plus particulièrement, sont réveillés, et qu'ils veulent faire quelque chose. Je pense qu'en 2012 on va beaucoup entendre parler de ces jeunes Japonais qui retrouvent l'espoir, qui vont sortir et qui vont peut-être venir dans nos pays pour jouer et partager avec nous. C'est bien parce qu'ils font vraiment des trucs super que ce soit dans le monde des mangas, des jeux ou de la musique. Le truc c'est qu'ils sont très timides, complexés, donc c'était très dur jusqu'à maintenant. Mais je sais qu'ils vont commencer à sortir, alors quand ils viendront, essayez d'aller les voir. Le simple fait d'y aller serait un super soutien pour ce pays, à qui il faudra je pense encore dix ans pour qu'il s'en sorte. Même un petit peintre qui aura le courage d'exposer en Europe, ou un coiffeur qui viendra à Paris pour apprendre, c'est déjà beaucoup. C'est ce que je demande aux fans, ce serait super. Sinon moi, je vais essayer de faire ce projet Tokyo Night et ces trucs néo-Japon, alors si vous passez à Nice, venez-me voir. Mes concerts ici ou au Japon sont toujours marqués sur mon site. Sur celui du label aussi, il y aura des infos très bientôt. Si vous pouvez nous aider à agrandir ce monde, ce serait super !
Merci beaucoup de nous avoir accordé cette interview, et nous vous souhaitons une excellente continuation.
Toutes les informations sur les activités de
Marc Panther sont disponibles sur son
site internet.