Interview

Entrevue avec Matthias Müssig de Gan-Shin et Okami Records

04/01/2016 2016-01-04 05:00:00 JaME Auteur : Jasy, Gin Traducteur : Kularu

Entrevue avec Matthias Müssig de Gan-Shin et Okami Records

Matthias Müssig, président de Gan-Shin Records et Okami Records, a répondu à nos questions concernant ses débuts, le marché du téléchargement légal et l’acceptation de la musique japonaise à travers l’Europe.


© Gan-Shin Records All Rights Reserved
Matthias Müssig est l’un des présidents de Neo Tokyo et le fondateur de Gan-Shin Records, premier et plus important label en ce qui concerne le rock japonais en Allemagne et en Europe, ainsi que d'Okami Records. Il nous a accordé une entrevue pour nous donner un aperçu de son travail et de la scène musicale japonaise en Europe.

L’idée de fonder un label n’est pas venue du jour au lendemain. En fait, nous devons nous replonger dix ans en arrière. Les deux managers de la boutique Neo Tokyo à Munich, au départ uniquement spécialisée dans la vente de manga et d’anime, ont voyagé à de nombreuses reprises au Japon pour leur travail. Étant en relation avec plusieurs personnes, des amitiés ont fini par se former. Au fil du temps, la gamme d’articles du magasin s’est étoffée et les clients ont commencé à demander l’importation de CD. Dans un sens, on pourrait dire que la forte demande de la part des clients fut un facteur déterminant dans la décision de fonder un label. Cependant, aucune des personnes concernées ne venait de l’industrie musicale, se jetant ainsi dans un univers inconnu. C’est une des raisons pour lesquelles il y a eu et il y a encore des difficultés à surmonter chaque jour, y compris sur les aspects politiques de la chose.

Le tout nouveau label Gan-Shin Records a rapidement grandi, devenant une alternative bon marché à l’achat de musique rock japonaise et a offert la possibilité à des groupes comme DIR EN GREY ou D’espairsRay de s’aventurer en Europe. Au cours de ses premières années d’existence, plusieurs CD de visual kei sont sortis à travers l’Europe. Cependant, Gan-Shin a très vite réalisé que cela ne suffisait pas. Voilà pourquoi Okami Records vit le jour en 2006. Okami Records devint ainsi la nouvelle plateforme pour les groupes de J-rock et de métal.

Lorsque nous avons demandé si les présidents du label pourraient aussi créer un sous-label pour les étoiles montantes de la J-pop, M. Müssig nous a répondu que « Si l’organisation générale fonctionne, nous ne pouvons effectivement pas exclure cette possibilité ». Ainsi, on ne sait toujours pas si les prochaines sorties de Horie Yui ou Hayashibara Megumi trouveront leur chemin vers l’Europe sous un nouveau label. Pour l’heure, plusieurs singles et albums sont disponibles sous Gan-Shin Recods en téléchargement uniquement.

Pendant l’interview, nous nous sommes plus particulièrement intéressés au défi que représente la sortie de la musique japonaise en Europe. Les réponses reçues se sont avérées très intéressantes. Il n’y a pas un seul gros défi, mais une multitudes de petits, qui ne varient pas seulement d’un artiste à l’autre, mais qui incluent aussi des aspects organisationnels et politiques, ainsi que la chute des ventes de CD au Japon. Malgré tout, Gan-Shin et Okami Records n’ont pas perdu espoir.

Le label existant depuis plus de dix ans, nous avons aussi voulu savoir quels changements au sein de la scène musicale japonaise les acteurs du label avaient pu remarquer et comment la musique en général avait évolué. Les réponses à ces questions furent elles aussi intéressantes. Le label a noté des changements concernant les artistes qui se sont produits à l'extérieur du Japon au moins une fois : plus ils ont eu de contact avec l’étranger et plus ils sont capables d’utiliser cette expérience dans leur musique et dans leurs paroles, avec pour conséquence des changements dans leurs compositions. Plutôt logique, n’est-ce pas ? De plus, M. Müssig explique qu’il est plus facile pour Gan-Shin d’attirer des artistes originaux en Europe, du fait de l’évolution de l’industrie musicale japonaise.

En s’intéressant de plus près aux artistes présents chez Gan-Shin Records et à leurs origines, on se rend rapidement compte que la plupart vient de la scène visual kei. De fait, nous avons voulu savoir comment le label lui-même décrirait le visual kei. « Bien sûr, l'aspect visuel est très important, y compris dans le nom. Mais pour moi, le visual kei sert à colorer le J-rock et le métal ! De plus, je pense que la langue japonaise est un élément important de ce style de musique », nous répond M. Müssig. Malgré des hauts et des bas dans l’intérêt que suscite le visual kei en Europe, le dirigeant du label croit que cette scène est toujours très attrayante pour les Européens. Dans l'Est de l’Europe cependant, le label enregistre un intérêt croissant.

Un peu plus tard, nous demandons à l'homme d’affaire : « Selon vous, quel groupe présent sur votre label mérite une meilleure reconnaissance en Europe ? » M. Müssig évoque le nom du groupe de métal Onmyo-za. Cependant, l'équipe du label souhaite que de jeunes formations comme DIV, Kameleo ou UNiTE percent également.

Concernant les débuts du label et l’intérêt général pour la musique japonaise en Europe, nous avons voulu savoir de quelle façon les téléchargements avaient impacté Gan-Shin. Durant notre entretien, il est apparu évident que, bien que la distribution numérique soit devenue très importante pour le label, elle n’est pas en mesure de rattraper les recettes réalisées avec la vente des CD. Cela ne relève pas d’un manque d’intérêt, mais de la faible commission perçue par le label pour les ventes numériques. A l’heure actuelle, il ne perçoit que 0,03€ par chanson téléchargée. Malgré ces défis, le label continuera à avancer.

Toujours au sujet des téléchargements, nous avons demandé quels étaient les avantages et les inconvénients des formats numérique et physique. Voici la réponse : les CD représentent quelque chose de tangible entre les mains des collectionneurs. De plus, il est facile d’y insérer des bonus. En comparaison, le téléchargement a l’avantage d’être plus rapide, plus direct et plus facile à mettre en œuvre. Il est accessible presque partout et son impact en terme de pollution est minime.

Au cours de notre interview, nous avons aussi discuté des collaborations de longue date entre l’agence Twisted Talent et les labels. M. Müssig nous répond : « Nous ne nous limitons pas à Twisted Talent. Nous avons l’habitude d’organiser des tournées par nous-mêmes, mais comme nous ne pouvions plus gérer avec lui seul, nous avons commencé à travailler avec de nombreux autres partenaires. ».

Gan-Shin Records a longtemps cherché une agence expérimentée dans la gestion des attentes, des problèmes et des craintes des artistes japonais. Le label a sans doute trouvé ce qu’il voulait en Twisted Talent, où tous les employés sont d’anciens musiciens de rock ayant joué au Japon et qui, de fait, comprennent bien la culture nippone.

Quand nous avons demandé à M. Müssig quel évènement l’avait particulièrement marqué, la réponse fut plus difficile à trouver. Pas parce qu’il n’y en a jamais eu, au contraire, il s'en produit tous les jours. Il explique qu’il s’est récemment rendu à un concert de DIR EN GREY. « Les concerts de DIR EN GREY sont toujours agréables au Japon ».

Mais aucun évènement drôle ne doit être passé sous silence : « Un évènement amusant que nous aimerions partager avec les lecteurs de JaME s’est déroulé pendant un voyage avec un de nos partenaires au Japon en 2006. Nous avons, entre autre, rendu visite à MUCC dans son studio et avons réalisé que même parmi les musiciens de talent, le cœur d’un geek bat. Yukke avait presque entièrement décoré le studio avec des figurines et des peluches. De "Nightmare Before Christmas" jusqu’à M&Ms, tout y était (voir photo plus bas). Et il semblerait qu’il n’ait pas perdu son enthousiasme car dans une vidéo des coulisses que MUCC nous a envoyé, nous avons découvert que M. Sumikko Gurashi Penguin est parti en tournée au Japon avec MUCC. Vous le trouverez peut-être vous-même dans la vidéo (ndlr : disponible à la fin de cette interview). »



Concernant les derniers projets du label, DIR EN GREY et MUCC sont revenus en Europe en mai dernier. Par ailleurs, sortiront les CD de Matenrou Opera, angela et T.M. Revolution.

De plus, le label a accepté une collaboration inhabituelle avec MAVERICK DC et Sony Music Japan nommée J-ROCK EXPLOSION 2014 "BATTLE OF THE BRAVE". Gan-Shin a ainsi accueilli le quatuor "Kanon" ainsi que le groupe umbrella en son sein. Il est toujours intéressant et excitant de découvrir qui Gan-Shin et Okami Records feront venir en Europe et quels albums sortiront.

Pour conclure, M. Müssig nous a laissé un message : « Chers lecteurs de JaME, depuis 2003, nous avons pu vivre notre passion pour le J-rock et le visual kei en faisant venir des groupes en Europe et en sortant leur musique ici. Nous devons notre réussite avant tout à vous et à tous les fans de J-rock et de visual kei. Merci beaucoup pour votre soutien ! Nous espérons que vous continuerez à nous suivre et que nous pourrons apprécier beaucoup de concerts ensemble, comme ceux de MUCC et de DIR EN GREY. Nous espérons aussi faire venir toujours plus de bonne musique par ici et aider les groupes que nous aimons à obtenir la reconnaissance qu’ils méritent.

Pour toute question ou proposition concernant de nouveaux groupes pour Gan-Shin et Okami Records, n’hésitez pas à nous envoyer un mail (info@gan-shin.de) ou un message sur notre site et sur Facebook. Peut-être que nous ne pourrons pas répondre à toutes vos attentes mais nous sommes toujours heureux de recevoir vos conseils ! »



JaME remercie Neo Tokyo, M. Müssig, Mme Jacobi, Gan-Shin Records et Okami Records pour cette interview.
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