En deux décennies, Onmyo-za s’est imposée comme l’une des formations les plus éminentes de la scène metal japonaise. Avec quatorze albums à son actif, le groupe de yokai heavy metal a gagné une reconnaissance tant nationale qu’internationale pour sa musique profondément encrée dans l’histoire et le folklore japonais. Le chanteur et bassiste d’Onmyo-za, Matatabi, lève ici le voile sur la complexité du dernier album en date du groupe, Hadou Myouou, paru le 6 juin dernier chez KING RECORDS.
Quel est le concept de votre nouvel album, Hadou Myouou ?
Matatabi : Ce titre a été choisi pour exprimer l’intention d'aller hardiment de l’avant, comme quelqu’un d’éclairé, sans quitter le chemin de nos croyances, à l’instar des concepts historique et bouddhique de « Jadou » (Mauvais Chemin) et « Hadou » (Puissant Chemin).
Ndlt : « Jadou » est le concept bouddhique du « Mauvais Chemin » ou d’avoir reçu un mauvais enseignement du bouddhisme et de s’éloigner du chemin de l’éveil. « Hadou » est l’acception classique chinoise de la croyance « Le Pouvoir est supérieur » et fait référence aux chefs ayant acquis leur statut par la force.
Pouvez-vous nous expliquer en quoi le visuel de Hadou Myouou fait écho au concept de l’album ?
Matatabi : Le photographe de talent Nonami Hiroshi a préservé l’atmosphère solennelle de nos visuels clés et de nos photos d’artistes, et a élaboré ceci dans le concept de Hadou Myouou.
Votre précédent album Karyoubinga possède un son plus symphonique. Avez-vous utilisé une autre approche avec Hadou Myouou ?
Matatabi : Hadou Myouou garde les mélodies riches et les arrangements délicats qui font l’originalité d’Onmyo-za, mais nous avons essayé de tendre vers des sonorités plus puissantes et lourdes. Sans vouloir porter atteinte au yokai heavy metal, je pense que nous avons réussi à créer une œuvre musicale drue.
Hadou Myouou contient un « Hadou MIX » d’Ouka Ninpouchou. Quelles sont les différences entre ce remix et la version originale ?
Matatabi : Ouka Ninpouchou (Hadou MIX) est une version à laquelle nous avons retiré toute la partie instrumentale et l’avons réenregistrée, réarrangée et rééditée afin qu’elle s’intègre parfaitement au son de Hadou Myouou.
Kuroneko interprète seule Ouka Ninpouchou. Y a-t-il une raison à cela ? Malgré le fait que ce morceau a été composé pour un anime a-t-il un lien avec le reste de l’album ?
Matatabi : Ouka Ninpouchou est chantée du point de vue de l’héroine Hibiki, donc Kuroneko l’interprète seule. Elle a été créée pour servir de générique d’ouverture pour « Basilik -Ouka Ninpouchou- » ; elle est donc entièrement adaptée à l’histoire de l’anime et a peu de lien avec les autres chansons figurant sur Hadou Myouou. Ceci étant, elle est tout à fait conforme à la philosophie générale d’Onmyo-za.
Haou et Shimobe ont un son plus lourd que le reste de l’album, tandis que Bureiko revêt un caractère hard rock plus classique. Pourquoi avoir utilisé ces différents styles sur un même album ?
Matatabi : Depuis les débuts d’Onmyo-za et jusqu’à maintenant, nous avons toujours cherché à repousser les limites du heavy metal. Tous nos albums, dont Hadou Myouou, incluent de nombreuses sonorités différentes, et cela a toujours été notre style.
Nous avons remarqué que Haja no Fuuin partage le même nom que le RPG de SEGA de 1986. Est-ce une coïncidence ? De quoi parle ce morceau ?
Matatabi : Haja no Fuuin dépeint le concept principal d’ « Onmyo-za », qui est de suivre le « Jadou » en restant dans le chemin du « Hadou » - d’où « Haja » - et l’opposition inébranlable que l’ « Onmyo-za » exprime face à ceux qui essayent et scellent « Haja ». Le titre de la chanson a été emprunté au jeu sur PC « Haja no Fuuin » pour l’effet. (En outre, le jeu « Haja no Fuuin » n’a pas été édité par SEGA mais par Kogado Studios. Il a ensuite rejoint SEGA Mark 3.)
Le titre de la sixième piste de Hadou Myouou est intriguant. Quel message voulez-vous faire passer avec Fushoku no Ou ?
Matatabi : « Fushoku » (corrosion) possède la connotation particulièrement négative de « décomposition » ou de « pourrissement », mais elle signifie aussi de façon plus positive qu’elle transforme les métaux et qu’elle agit activement pour en faire un matériau à la texture nouvelle. Depuis la création d’Onmyo-za, nous avons non seulement cherché à protéger le heavy metal comme quelque chose de figé, mais aussi à le faire se corroder pour créer un nouveau heavy metal, si nous considérons le heavy metal comme un unique metal. Notre comportement peut également être perçu comme portant négativement atteinte au heavy metal en le pourrissant. Quoi qu’il en soit, ce morceau exprime la volonté de devenir le « roi » de ceux qui agissent, si nous comparons l’acte de créer de nouvelles choses avec ma pensée sur « la corrosion ». Toutes ces significations sont incluses dans Fushoku no Ou.
Ippondatara met à l’honneur un solo de basse ou de guitare. Qui l’a interprété, et était-il préparé ou improvisé ?
Matatabi : C’est mon solo de basse, je l’ai joué avec une distorsion et une pédale wah-wah. Bien qu’il y ait quelques improvisations, il s’agissait d’une décision tout à fait consciente de jouer un solo venant du cœur.
Les précédents albums d’Onmyo-za contiennent souvent des ballades. Pourquoi n’y en a-t-il aucune sur Hadou Myouou ?
Matatabi : Cet opus a un son très puissant, comme nous le souhaitions, donc nous avons fait le choix de ne pas inclure de ballade afin de ne pas perturber l’atmosphère générale de l’album.
Y a-t-il un des morceaux de Hadou Myouou qui a été particulièrement difficile ou amusant à créer ?
Matatabi : Je peux seulement dire que tous les morceaux ont été durs mais également amusants à créer.
Pouvez-vous nous expliquer quel morceau de cet album est le plus remarquable selon vous ?
Matatabi : Je vais vous répondre de mon point de vue. Encore une fois, le chant de Kuroneko résonne très clairement, et plus particulièrement dans Iduna Otoshi, sa voix est sans conteste plus brillante qu’aucune autre. Dans la même chanson, le solo de guitare de Karukan est un chef d’œuvre, et dans l’outro de Tesso no Aza, le solo de guitare de Maneki vous submerge jusqu’aux larmes avec son propre langage. Dans ce même morceau, le chant émouvant de Matatabi en exprime clairement l’histoire.
Comment choisissez-vous les folklores et les youkai sur lesquels écrire ? Qu’en est-il pour Hadou Myouou ?
Matatabi : Nous choisissons les folklores et les youkai en fonction du thème et de l’image de l’album. Nous avons donc également choisi des folklores correspondants à Hadou Myouou.
Qu’est-ce qui vous inspire le plus dans le folklore japonais ?
Matatabi : Il est difficile d’identifier précisément ce qui nous inspire, mais nous sommes souvent fascinés par le folklore ayant une profonde signification quant à l’humanité et les humains en général.
Matatabi, réalisez-vous encore les artworks des albums d’Onmyo-za ?
Matatabi : Depuis notre album Houyoku Rindou, les photos ont toujours été prises par Nonami Hiroshi, le design réalisé par Matatabi, et nous travaillons ensemble pour créer l’artwork final.
Quelles sont les techniques musicales ou les sujets que vous aimeriez faire vôtres à l’avenir ?
Matatabi : Comme à l’accoutumée, nous voulons utiliser le thème des youkai et le folklore pour exprimer les émotions humaines dans nos morceaux.
Onmyo-za a-t-il le projet de se produire à l’étranger dans un avenir proche ?
Matatabi : Nous n’avons pas ce projet, mais nous voudrions vraiment nous produire à l’étranger un jour, peu importe le pays.
Avez-vous un message pour les lecteurs de JaME ?
Matatabi : J’imagine que vos lecteurs sont dispersés aux quatre coins du monde, mais s’ils en ont l’occasion, j’aimerais qu’ils puissent écouter la musique d’Onmyo-za. Même si nous sommes un groupe heavy metal et que nous avons un son rock encré dans la culture japonaise, je crois fermement que n’importe qui peut apprécier notre musique.
JaME souhaite remercier Onmyo-za et KING RECORDS pour avoir rendu cette interview possible.