Il y a 28 ans BUCK-TICK lançait le single Jupiter
Il y a vingt-huit ans le groupe mythique BUCK-TICK lançait son single Jupiter sur le label Victor. Rétrospective sur ce groupe dont la carrière a traversé plus de trois décennies.
Sixième piste de l’album Kurutta Taiyou (狂った太陽, ou en français, Le Soleil Fou), Jupiter s'inscrit parfaitement dans le ton mélancolique de ce dernier. 1991 est aussi l’année de la gueule-de-bois pour BUCK-TICK, qui a du mal à se remettre du succès inespéré de leur précédent album Aku no Hana (悪の華 ou Les Fleurs du Mal, titre emprunté à Baudelaire). Aku no Hana, qui a catapulté le groupe du charismatique guitariste Hisashi Imai sous le feu des projecteurs tout juste après de la sortie de prison de celui-ci, se voulait une revendication et une affirmation : le groupe, qui s’était écroulé sur le scandale de l’interpellation de Imai en possession d’une quantité significative de LSD en 1989, voulait démontrer au Japon qu’il n’allait pas jeter l’éponge pour autant. Du coup, en plus du lancement de ce nouvel album, le groupe joue en concert devant 50 000 fans au Tokyo Dome à la fin du mois de décembre, un concert de fin d’année qui est devenu tradition et qui est honorée jusqu’à ce jour sous le nom de Day in Question.
Mais le Japon encore très conservateur des années 1990 a du mal à pardonner et le sort médiatique s’acharne sur ces cinq jeunes musiciens qui se battent depuis le début pour s’échapper de l’étiquette d’idoles, ces porte-étendards des maisons de disques utilisés pour vendre toutes sortes de produits à une horde de jeunes qui copie chaque détail et maniérisme de leurs gourous rêvés. C’est également à cette époque que le phénomène tabloïd se répand en Orient et que les rumeurs sur la vie privée de chacun prolifèrent - on assiste à la naissance du phénomène des groupies et à la banalisation du voyeurisme au Japon. Ainsi naît l’idée d’un soleil qui rend fou, leitmotiv de ce nouvel album. En réplique directe à ces attentes qu’ils perçoivent comme déshumanisantes, l’image du groupe change et met moins l’accent sur les éléments esthétiques et plus sur la qualité des compositions. Il y a un gros travail expérimental au niveau des instruments et l’écriture des paroles est confiée dans sa quasi-totalité au chanteur, Atsushi Sakurai. Plus introspectif que son guitariste mythique, ce passionné de littérature française opte pour un style bien plus sombre et n’hésite pas à aborder des sujets tabous pour la société nippone de l’époque. Ouvertement acolytes de The Stalin, le groupe désormais aligné sur le double leadership de Imai et Sakurai puise dans le revers de sa propre célébrité et ose s'attaquer à des thèmes qui choquent : drogues, sexe, violence et même la mort. Ce dernier thème hante notamment Jupiter, requiem pour la mère du chanteur que le cancer faucha plus tôt dans l’année.
Les fans de la première heure évoquaient même le souvenir d’un groupe aux paroles tellement grandiloquentes et percutantes que personne ne voulait se faire attraper en les écoutant. Heureusement, à l’époque de la sortie de Jupiter les cassettes et CDs étaient déjà bien plus répandus, ce qui épargnait l'embarras d’être surpris par ses parents en train de danser au son de morceaux comme Sex for You (Taboo, 1989) ou Sexual XXXXX! (Sexual XXXX!, 1987, le mot censuré par Victor Entertainment étant “Relations”).
Depuis Kurutta Taiyou, le groupe a sorti quinze autres albums studio, le plus récent (No. 0) datant de mars 2018.