Dossier

Les instruments à vents

14/05/2007 2007-05-14 12:00:00 JaME Auteur : Loic

Les instruments à vents

Présentation des principaux instruments japonais à vents.


© Tanja
Les instruments à vents japonais pourraient grossièrement se résumer aux différentes flûtes et à un instrument des plus soignés, le shô, sorte d’orgue de bouche de facture exceptionnelle. Le nombre de flûtes est cependant impressionnant : il s’agit en fait depuis toujours d’un des instruments les plus chéris par les Japonais, cadeau céleste au moins figuré quand il n’est pas directement célébré dans les diverses formes d’art, et ce, depuis la préhistoire.


Instruments présentés :
1) Shakuhachi
2) Shô
3) Hichiriki
4) Les différentes flûtes traversières
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1) Shakuhachi - 尺八
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Origine : Importé probablement de Chine vers la fin du VIIe siècle, cette flûte droite possède des ancêtres fort nombreux, qui viennent d’Egypte ou d’Iran.

Caractéristiques : Fait d’un bambou d’une seule pièce, le shakuhachi est de fabrication très simple. L’intérieur est laqué, mais l’extérieur reste volontairement rustique. Cette flûte possède cinq trous : quatre antérieurs, percés à égale distance, et un postérieur, pour le pouce. Son nom vient de ses dimensions, à savoir une longueur d’un shaku et huit (qui se dit hachi en japonais) sun, soit environ 54,5 cm, pour un diamètre de 4,5 cm. La principale caractéristique de l’instrument est son embouchure en simple entaille. Depuis Edo, celle-ci est parfois renforcée par une pièce en corne de buffle ou d’ivoire, de forme trapézoïdale, ceci afin d’en éviter l’usure.

Le jeu : Le shakuhachi est tenu droit, comme la clarinette. Les effets du son rendu peuvent considérablement varier selon les mouvements de tête de l’instrumentiste, ceci grâce à l’angle de taille de l’embouchure. On ajoute à ces possibilités de variations différentes techniques de respiration qui confère une tessiture spécifique à cet instrument.

Usage et sonorité : Le shakuhachi est plus affirmé dans les registres graves, pour lesquels il produit un son vibrant et profond, que dans les registres élevés, qui le font sonner comme une clarinette trop « métallique ». L’instrument est cependant capable de rendre presque tous les sons de la voix humaine, jusque dans ses soupirs et hésitations, selon la prise de l’instrumentiste. Considéré comme masculin, le shakuhachi sera longtemps l’apanage des religieux bouddhistes mendiants. Il a également eu sa place au sein du Gagaku* la musique de cour. Désormais, le shakuhachi possède un répertoire qui lui est propre, accompagnant souvent le koto ou le shamisen. On le retrouve également dans le Nô* mais aussi dans le Kabuki*où il sert à évoquer les prêtres mendiants qui l’ont popularisé. Comme beaucoup d’instruments folkloriques, on peut également parfois l’entendre lors dans des formations instrumentales populaires.

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2) Shô -
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Origine : Cet « orgue de bouche » est importé au 8e siècle de Chine, où il porte le nom de sheng. Il est quelque peu adapté sur l’archipel, notamment au niveau de sa taille, plus modeste que les modèles chinois.

Caractéristiques : Comme tout instrument se rapprochant de l’orgue, le shô est d’une facture très soignée et d’un design presque architectural. Sa beauté lui vaut au Japon d’être comparé aux ailes repliées d’un phénix, dont on dit d’ailleurs qu’il emprunterait la voix.
L’instrument est composé d’un bol de résonance laqué qui fait office de réservoir pour le vent, dans lequel sont enfichés dix sept tuyaux de bambou de longueurs et diamètres différents, qui fonctionnent comme des petits tuyaux d’orgue. Deux de ces tubes sont désormais muets : ils servent éventuellement à l’évacuation de l’air, mais restent surtout présents pour une question d’esthétisme, les tubes étant disposés par paires.
La boîte de résonance appelée kashira. Sorte de boîte circulaire, elle comporte en fait une partie supérieure percée en nid d’abeille, trous dans lesquels se fichent les dix sept tuyaux. On trouve également à mi-hauteur du kashira le fukiguchi, c'est-à-dire l’embouchure par laquelle l’instrumentiste souffle ou aspire l’air. L’étanchéité dans les jointures est assurée par une ceinture d’argent. On note des tentatives pour contrer l’emprise de l’humidité, avec par exemple l’application d’une composition minérale bleuâtre sur la languette libre des anches de cuivre se trouvant en bac de tubes. L’humidité est en effet très néfaste pour l’instrument, puisqu’un tuyau humide ne pourra produire de son. C’est pour cette raison que l’on prendra le plus grand soin dans le rangement du shô (enveloppé dans des tissus de soi et conservé dans une boîte hermétique) et que l’on réchauffera l’instrument sur un petit brasero avant toute utilisation.

Jeu : Le shô est porté droit, soutenu des deux mains, les lèvres posées sur l’embouchure, et l’on bouche les trous des tuyaux que l’on veut faire sonner. Le souffle peut-être aspiré ou expiré, selon l’alternance de la respiration de l’exécutant : la continuité du son du shô dépend donc de la technique respiratoire de l’instrumentiste, toute interruption ou variation ayant des répercussions sur le rendu sonore.
Il est à noter que pendant l’exécution, il est possible que l’on soit mené à réchauffer de nouveau sur un brasero, pour éviter toute attache de l’humidité.

Usage et sonorité : Lorsque le shô est introduit au Japon, il intègre le Gagaku*, la musique de Cour, où son rôle consiste à soutenir la mélodie. Sa sonorité est riche et délicate, il s’agit de l’instrument harmonique japonais par excellence. Il apparaît donc comme instrument noble, aidé en cela par sa facture de toute beauté, et ne quittera pas les sphères de la musique impériale.
L’accord des tuyaux est assuré par une goutte de cire déposée sur la languette libre des anches de cuivre se trouvant au bas de chaque tuyaux : plus cette goutte est petite, plus le son est pur.

Il est à noter qu’en 2005, la chanteuse Björk, bien connue pour ses diverses expérimentations sonores, a centré ses compositions sur cet instrument pour Drawing Restraint 9, un concept musical et cinématographique dont le scénario se déroule au Japon.

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Hichiriki - 篳篥
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Origine : Ce hautbois en bambou vient très certainement d’Asie centrale, le modèle japonais dérivant de modèles chinois (le guan) ou plus certainement coréen (le piri).

Caractéristiques : Composé d’un tube de 18 cm environ, laqué à l’intérieur comme à l’extérieur, fait d’un bambou spécial, le hichiriki est percé de sept trous sur le dessus, et de deux en dessous. Son embouchure n’est pas fixée. L’anche double est faite de deux lames de roseau attachées avec une cordelette.

Jeu : On joue du hichiriki verticalement, et son exécution n’est pas des plus aisées, notamment à cause de sa configuration en anche double. L’embouchure doit être calée à chaque fois, maintenue par un petit morceau de papier humidifié. Les sons restent difficiles à modifier.

Usage et sonorité : Le hichiriki est encore une fois un des instruments du Gagaku, la musique de Cour. Par ses origines troubles, il peut être aussi bien entendu dans des morceaux d’origine chinoise que dans ceux d’origine coréenne. Le timbre du hichiriki est particulièrement aigu et nasalisé, puissant et déchirant, ce qui en fait un instrument antipathique à l’oreille européenne, tout en étant parfois critiqué par les Japonais même, notamment par la grande figure de la littérature japonaise classique, Dame Sei Shônagon, qui définissait sa sonorité comme tout simplement insupportable.

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Les différentes flûtes traversières - 横笛
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Origine : Les flûtes traversières sont importés de Chine et de Corée dès les débuts du premier millénaire.

Caractéristiques : La dénomination générale donnée aux flûtes au Japon est fue, et l’on désigne en général de façon plus précise les flûtes traversières par le mot yokobue (qui a un sens proche de « flûte tenue de côté »). Une de leurs caractéristiques communes est que les flûtes ne sont pas bouchées du bout des doigts, mais du milieu de la phalange médiane des doigts.
Il n’est pas question ici de présenter d’une façon détaillée chacun des modèles de flûtes traversières pouvant ou ayant pu exister au Japon. Voici cependant une liste rapide de quelques variétés de ces instruments :
- Yamato-bue - 大和 : ou flûte du Yamato, l’ancienne plaine à l’origine de l’unité nationale du Japon. Réputée d’origine céleste et ayant – dit-on – le pouvoir d’éloigner les serpents, il s’agit d’une flûte de concert avec six trous, et intérieur laqué en rouge.
- Kagura-bue (ou azumafue) - 神楽笛 : flûte de musique religieuse, jouée pendant les cérémonies Shintô*. Elle est mince, laquée, renforcée de ligatures d’écorce et possède six trous. Une de ses extrémités est fermée est recouverte de brocart rouge, couleur attribuée à l’exécution de la musique chinoise.
- Koma-bue - 高麗笛 : d’origine coréenne, ornée de brocart vert (couleur attribuée à l’exécution de la musique coréenne), elle est plus petite, au son plus élevé et possède six trous.
- Ryûteki - 龍笛 : l’une des flûtes traversière japonaise les plus connues. D’origine chinoise, elle possède sept trous, et elle passe pour être l’ancêtre de la flûte de Nô*. Il s’agit de la plus grande des flûtes du Gagaku*.
- Nôkan - 能管 : Fait de bambou sec, la nôkan est le seul instrument mélodique de l’ensemble du Nô*. De la même famille que la ryûteki, cette flûte mesure environ 34 cm et est laquée de rouge à l’intérieur, de noir à l’extérieur. Le souffle d’attaque permet de produire des effets de puissance et d’aigus bien adaptés à son répertoire.
- Take-bue (ou shino-bue) - 篠笛 : cette flûte du Kabuki* est également un instrument populaire. Il s’agit d’une flûte traversière simple, en bambou, à 6, 7 ou 10 trous, et souvent laquée de noir. Les modèles à 12 trous sont conçus pour accompagner le shamisen.

Enfin, en marge des flûtes traversières, on pourra noter également la présence parmi les instruments à vent japonais des shô no fue, sortes de flûtes de pan qui comportent de dix à vingt-quatre tuyaux.



* Ces termes, qui se référent à différents genres musicaux appartenant au domaine de la musique traditionnelle japonaise, font l’objet d’une présentation spécifique dans la troisième partie de ce dossier, « Les différents genres musicaux de la musique traditionnelle japonaise». Nous vous invitons donc à consulter la partie concernée pour plus d’informations.
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