Si la pensée nationaliste à lapproche de la Seconde Guerre mondiale avait contribué à un regain dintérêt du Japon pour sa musique traditionnelle, les décennies passant, larchipel ne se passionne désormais plus autant pour cet art.
Gardons tout dabord à lesprit que la transmission de ce dernier se veut de plus en plus restreinte : même si gagnée peu à peu par linfluence des méthodes occidentales, la théorie de lenseignement de la musique japonaise se veut toujours fortement élitiste. La technique des instruments nest jamais globale, chaque maître enseignant un instrument unique, et chaque élève devant donc sy consacrer. Il sagit donc dune éducation musicale bien lente et fortement contraignante, ne correspondant plus à la somme de patience des Japonais de notre siècle. La théorie musicale reste enseignée au niveau scolaire, mais à un volume très faible, et encore une fois, linfluence des conceptions occidentales de létude de la musique a considérablement changé la donne. Lenseignement spécialisé reste cependant conséquent : lUniversité des Arts de Tokyo, la Tôkyô Geijutsu Daigaku, enseigne toujours les musiques du Nô, du koto et des chants Naga-Uta, encouragé en cela par lEtat lui-même.
Une certaine volonté de perpétuation de la connaissance de cet art est bien présente : la NHK (télévision et radio de service public) consacre par exemple 30% de ses programmes classiques à la musique traditionnelle japonaise et, à linstar de la musique classique en France, dautres programmes trouvent toujours une place dans les différents media.
Cependant, on ne peut nier que le genre se trouve sur le déclin et semble lutter pour survivre, là où la musique classique occidentale reste toujours dune actualité forte et rassemble un public considérable parmi toutes les générations. Le marché du disque en est lillustration la plus flagrante : si chez tout disquaire généraliste européen, la « musique classique » représente un haut pourcentage des rayonnages, il en va tout autrement pour la musique continentale au sein du marché japonais, la musique classique occidentale layant depuis longtemps supplantée. Notons également que peu denregistrements musicaux à destination de létranger voient le jour, une simple visite au rayon Musiques du Monde vous en convaincra facilement.
La survivance du genre, en dehors de la promotion culturelle publique, passe donc sur larchipel par son utilisation au sein des nombreux films et séries dépoque (même si son emploi ny est pas toujours respectueux de la réalité) ou encore par lactivité touristique, qui, sous couvert doffrir un certain exotisme aux étrangers, perpétue la tradition des représentations musicales, notamment pour les musiques liées au genre théâtral. Certains pourraient voir dans les tentatives dexpérimentation de fusion de la musique occidentale et de la musique continentale une volonté de modernisation de cet art, là où les spécialistes sarrachent eux les cheveux face à cet outrage : toujours est-il quil ne sagit souvent que dun emprunt plus ou moins fugace, qui na jamais aboutit à un genre nouveau. Aussi pourrait-on dire que la musique traditionnelle japonaise se contente de coexister tout simplement dans sa forme plus ou moins originelle avec les musiques actuelles, le fameux cliché dun Japon où se côtoient à la fois tradition et modernité