SUGIZO sur LUNA SEA

En préparation pour cette tournée, JaME a eu la chance de s'entretenir avec SUGIZO à Los Angeles pour parler des récentes, mais non moins étonnantes, activités du groupe. Le musicien, très occupé, semblait enthousiaste à l'idée de nous parler du travail en cours de LUNA SEA, et particulièrement excité de jouer à nouveau avec ses membres.


LUNA SEA revient en novembre pour une tournée mondiale. Qu'est-ce qui a provoqué cette réunion ?

SUGIZO : Ces dernières années, les rapports entre les membres du groupe étaient bons. A contrario, il y a près de dix ans, l'ambiance dans LUNA SEA était assez mauvaise et on avait du mal à faire de la musique. Mais bien que nous ayons arrêté d'en faire, nous ne nous sommes pas séparés. Aussi, il y a trois ans, nous nous sommes vus juste pour une journée, et le courant est bien passé. La musique de LUNA SEA était elle-même vraiment bonne, et je pense que celle-ci et les sons nous ont guidés.


Qu'est-ce qui a convaincu le groupe de partir sur cette tournée ?

SUGIZO : Ce concert d'il y a trois ans nous a donné envie d'en faire plus. A mon avis, jouer dans autant d'endroits importants sera bon pour nous. Même si ça sera notre première fois et que nous serons d'abord nerveux, de nombreux fans américains et européens nous ont soutenu et donné beaucoup de courage.


Pourquoi avoir choisi ces salles en particulier ? Pensez-vous qu'une seule date en Europe et une aux Etats-Unis suffiront à votre public ?

SUGIZO : Cette tournée est juste une première pour nous, mais ça ne sera pas la dernière ! Nous ne voulions pas en faire trop pour cette fois. La signification d'un concert unique, comme celui d'il y a trois ans au Tokyo Dome, est très particulière. Los Angeles est la capitale mondiale de la musique et du divertissement. De même, en Allemagne, ils adorent la musique japonaise et en demandent. Aussi ces performances uniques dans chacun de ces lieux sont très importantes.


Comme vous venez de le dire, Los Angeles est le noyau du monde musical et vous y êtes allé un certain nombre de fois jusqu'à maintenant.

SUGIZO : Oui ! J'y vais souvent !


Qu'en est-il des autres membres de LUNA SEA ? N'y a-t-il rien que vous voudriez leur montrer ou quelque chose que vous les inviteriez à faire alors que vous y seriez aussi ?

SUGIZO : Je pense que notre bassiste, J, aime énormément cette ville. Pour exemple, je suis allé il y a longtemps à Londres - il y a peut-être treize ou quatorze ans - quand nous commençions chacun une carrière solo, et j'ai adoré cette culture musicale de la scène indie anglaise. Mais J voulait vraiment venir ici, à Los Angeles. La musique américaine correspond vraiment à son style. Je crois qu'il apprécie toujours autant la musique et la culture de L.A. Quant aux autres, je n'en suis pas aussi sûr. Ryuichi reste probablement fidèle au Japon.


Qu'est-ce qui vous plaît le plus à Los Angeles ?

SUGIZO : Les plages. Marina Del Rey, Santa Monica et Venice sont mes préférées. Elles sont belles et accessibles. J'ai beaucoup de bons souvenirs avec ma fille là-bas. Quand elle était petite, nous y allions souvent pour jouer et faire du roller. Mais maintenant qu'elle grandit, elle ne veut plus y aller avec moi !


Pensez-vous que vos souvenirs et la culture musicale liés à la localisation de vos prochains concerts influenceront LUNA SEA d'une manière ou d'une autre ?

SUGIZO : Nous jouons juste à notre façon, mais j'espère que le public aimera. J'ai souvent joué en Europe et aux Etats-Unis, mais ça sera la première fois avec LUNA SEA et c'est ça qui est important. Ceci dit, j'apprécie l'ambiance dans ces endroits.


Quelle réaction attendez-vous des fans de LUNA SEA ?

SUGIZO : Une réaction typiquement américaine. Ils sont Américains et aiment la musique japonaise, c'est génial ! J'ai donné un concert avec X JAPAN la nuit dernière et le public s'éclatait ! Bien sûr, leur attitude était différente de celle des fans japonais. Ils ont fait de leur mieux pendant le show et voulaient vraiment nous encourager. Ce sentiment est magnifique et je l'adore. Je souhaite à LUNA SEA de connaitre le même.


Ces trois dernières années, vous avez joué deux fois avec LUNA SEA. Comment c'était d'être à nouveau avec eux sur scène après tant de temps ?

SUGIZO : Jouer avec ce groupe m'est naturel. Ca allait tout seul et je me sentais comme lors du dernier concert que nous avions fait ensemble.


Alors vos sentiments n'ont jamais changé ?

SUGIZO : Non, par contre notre dextérité n'est plus la même. C'était très agréable. Ces sept dernières années, nous avons tous donné beaucoup de concerts et avons tant fait de musique que notre niveau a augmenté pour devenir bien meilleur. C'est plus sympa et confortable maintenant. Le doigté est si important pour jouer et transmettre notre message.


Pensez-vous que ces expériences, en tant qu'artiste solo et avec vos autres groupes comme X JAPAN, changent la manière dont vous jouez les chansons de LUNA SEA et les voyez ?

SUGIZO : Oui, bien sûr. Mon style m'est propre, mais mon jeu n'est plus le même. J'ai l'habitude d'écouter différents genres et je pense être capable de jouer des styles musicaux variés. Evidemment, mon travail en solo comme la musique de LUNA SEA me vient naturellement. X JAPAN, a contrario, est réellement différent de mon style d'origine. Le sien prend racine dans le heavy metal, dont je n'ai pas joué depuis longtemps. A l'époque, quand j'étais au lycée, c'était mon truc : j'en ai beaucoup fait et m'en suis imprégné. J'avais déjà la technique. C'est un bon style pour les façons dont je joue de la guitare.


Alors vous avez appris différents jeux de guitare ?

SUGIZO : Oui ! Je peux m'initier à n'importe lequel. C'est quelque chose de très spécial. Aujourd'hui je ne suis plus un débutant ; je suis guitariste depuis vingt-cinq ans, mais je rencontre toujours autant de défis et de difficultés. Je suis un homme particulièrement chanceux, mais je pense pouvoir encore apprendre. Je reste un étudiant !


Apprenez-vous toujours le violon ?

SUGIZO : Bien sûr. J'ai donné des concerts où je ne faisais que du violon ces dernières années et je pense m'être récemment amélioré. Quand je jouais avec LUNA SEA dans les années 90, ma part de violon était réduite. Il n'était pas nécessaire que je m'entraîne. Pourtant, ces derniers temps, j'ai eu de plus en plus besoin de le faire ! Cet instrument est bon pour ma dextérité. Par certains côtés je suis meilleur. Par exemple, pour improviser, je préfère le violon. Je ne sais pas pourquoi, mais les mélodies m'apparaissent plus libres. Alors que quand je ne fais que jouer, ou dès que j'ai envie de quelque chose de plus rythmé, la guitare redevient prioritaire. C'est très différent. Je devrais faire plus de violon, surtout avec X JAPAN. Tout à coup, je dois jouer plus et de nouveaux morceaux que je n'avais jamais joué avant. Soudain il me faut apprendre. Tout dans les performances d'X JAPAN peut brutalement changer !


Est-il plus facile d'apprendre avec le temps ?

SUGIZO : Non, pas vraiment. Mais c'est important. Et je dois me montrer optimiste.


Quelles chansons de LUNA SEA êtes-vous impatient de rejouer ?

SUGIZO : Lesquelles ?! C'est si difficile ! Il y en a tellement que je voudrais jouer à nouveau. Ce n'est pas un titre connu, mais le profond et pourtant immense Virgin Mary. C'est un morceau de notre dernier album, il dure environ dix minutes. J'espère sincèrement le rejouer.


LUNA SEA l'a-t-il souvent joué en tournée ?

SUGIZO : Pas tellement, c'est une chanson difficile. Mais avec le perfectionnement de la technique de chacun, on peut la faire souvent maintenant.


Pensez-vous qu'il y ait une chance pour que LUNA SEA écrive de nouveaux morceaux dans un futur proche ?

SUGIZO : Certainement ! Nous en composons en ce moment.


Est-ce plus facile d'écrire de nouvelles chansons avec l'expérience ?

SUGIZO : Je pense que ça dépend de nos états du moment. Quand dans l'immédiat ça va, la composition n'est pas très difficile. Mais quand on a de l'ego, ça le devient vite. Nous n'en avons pas besoin dans notre musique, nous devrions en faire et jouer seulement pour nous exprimer. Pas pour qu'elle soit négative, ni pour une question d'auto-satisfaction. Ces sentiments ne sont pas utiles parce qu'avec eux viennent des tensions. Quand nous les ressentons, on ne peut plus écrire.


Par la suite, vous avez travaillé sur X JAPAN, la tournée de LUNA SEA en préparation et votre projet solo. Où trouvez-vous le temps de faire tout ça ?

SUGIZO : Je ne l'ai pas. Actuellement ça pose un gros problème. Mais c'est assez simple : je peux renoncer à dormir. Ce n'est pas si dur. J'adore la musique.


Beaucoup de groupes de visual kei en activité voient LUNA SEA comme une grosse influence. Que pensez-vous de cette scène aujourd'hui, en tant qu'influence majeure ? Ne ressentez-vous pas de pression ?

SUGIZO : Je suis désolé mais je ne fais pas attention aux groupes de visual en ce moment. J'ai quelques amis comme DIR EN GREY, mais je n'en ai pas tellement. MIYAVI en est aussi un. Pardonnez-moi, mais je ne connais pas les formations actuelles. Ca ne représente donc aucun stress. La scène musicale japonaise comprend énormément de groupes de visual, mais leur musique ne m'intéresse pas vraiment. Ils ne peuvent pas faire de bons sons, et la musique est juste un loisir pour eux. Je ne perçois pas leur âme dans ce qu'ils font, mais quelques artistes sont géniaux ! Je me rapprocherais bien de certains en tant que musiciens.


Pour finir, pourriez-vous laisser un message à vos fans ?

SUGIZO : J'ai toujours dit des « choses simples ». La musique n'a pas de frontières, et nous n'en avons pas non plus. C'est très important. Je souhaite sincèrement vous retrouver et créer comme une union avec vous. Je pense vraiment qu'on peut le faire - n'importe quel musicien, rock, art ou même divertissement -, c'est possible. Les politiciens japonais et chinois se sont battus récemment. C'est juste un problème de politique. Les gens de droite et tous les politiciens veulent tout le temps la bagarre. Je ne suis pas d'accord. Seuls les musiciens et leurs fans peuvent trouver l'unité. Nous devrions envoyer un message aux hommes politiques comme quoi nous refusons de nous battre. Je crois en le pouvoir de la musique, et en de belles relations humaines. C'est vital pour notre monde. Je veux rencontrer plus de publics. J'espère toucher leur coeur et leurs sentiments, ça compte beaucoup pour que nous grandissions.


JaME voudrait remercier SUGIZO, LUNA SEA, Maru Music et Yaz Noya pour avoir rendu cette interview possible. JaME remercie également Zhang Jingna photography.